L'article ci-dessous est paru dans le quotidien Le Populaire du Centre, France, pages 1 et 2, le 15 septembre 1954.
Le cultivateur a reconstitué hier, devant les enquêteurs, sa rencontre avec le passager de la "soucoupe volante"
(DE NOTRE ENVOYE SPECIAL: JACQUES MARJAC.)
Bugeat. -- A 58 ans, M. Antoine Mazeaud est un solide morceau d'homme, accusant 1 m. 82 sous la toise. Jusqu'ici, il avait la conscience sereine de tout ses semblables résidants au hameau de Mouriéras, à 1 km. 500 de Bugeat, sur la route de Tarnac, s'accrochant à cette rude terre qui n'offre cependant en retour que de maigres ressources.
Hier, M. Mazeaud n'est allé qu'une fois dans l'après-midi voir son champ de blé noir, accompagné dans cette étrange visite par M. Bernard, commissaire aux renseignements généraux de Tulle, son adjoint l'inspecteur Gratias, les gendarmes de Bugeat et quelques journalistes.
Sous les ondées répétées, l'homme refit son récit, calmement, clairement, indiquant du doigt les endroits précis et s'attachant à mimer les réactions qui l'animèrent au moment des faits.
Le commissaire Bernard était décontenancé car ce que venait de répéter, les gestes que venait de reconstituer le cultivateur, correspondaient point par point à la déposition faite une demi-heure auparavant et enregistrée par l'inspecteur Gratias.
- Vous pourrez m'interroger cent fois, cent fois je vous répondrai la même chose puisque je ne mens pas, enchaîna M. Mazeaud...
(suite en page 2)
Le soir du 10 septembre, M. Mazeaud quittait son champ du "Puy", situé à 1 km. 800 de chez lui. Il venait de couper le blé noir et s'engageait dans le chemin rocailleux bordé de genets et de fougères. Il était 20 h. 30 et la lune, quoique claire, ne permettait qu'une médiocre visibilité.
- J'ai alors distingué un homme qui marchait vers moi, précise le cultivateur. Il marchait en baissant la tête.
- De petite taille?
- Moyenne.
- Que s'est-il passé ensuite?
- Il s'est approché de moi, m'a serré la main, a retiré son casque, sorte de protège-tête métallique comme en portent les motocyclistes, mais dépourvu de mentonnière, puis m'a donné l'accolade sans jamais lever la tête.
- Vous a-t-il parlé?
Non, il n'a de même émis aucun son. Perplexe, j'ai laissé tomber la fourche que je portais sur l'épaule et l'homme s'est rapidement engagé dans la lande.
- N'avez-vous pas tenté de le poursuivre?
Nullement, j'étais comme paralysé; avec un ami à mes côtés, peut-être aurions-nous engagé la poursuite... Revenu de mon émotion, mon regard fut alors attiré par une masse oblongue qui prenait lentement de l'altitude et qui brillait faiblement. La "chose" me parut passer sous la ligne électrique qui borde la route de Tarnac; de profil, la longueur n'excédait pas six mètres.
JE NE VOULAIS RIEN DIRE
Sidéré, un peu tremblant, M. Mazeaud regagna son domicile. Il soupa et dormit normalement. Pourtant, d'heure en heure, ces faits le tracassaient; il fit de son épouse la confidente et entretint son fils, instituteur à Bort-les-Orgues, de la scène qu'il venait de vivre, se défendant âprement d'avoir été le jouet d'une hallucination et encore moins d'avoir imaginé...
Finalement, les langues se délièrent à Bugeat et le "cas" du "père Mazeaud", narré chez l'épicier, fut colporté chez le boulanger puis chez le boucher pour aboutir enfin à la gendarmerie... qui transmettait à la police de Tulle!
M. Antoine Mazeaud est un citoyen travailleur, sobre (il ne boit pas d'alcool) et bénéficie de l'estime générale sur tout le territoire de la commune. Il n'a encore jamais lu de récits de "science-fiction" et ne veut pas en entendre parler.
Le plus troublant, et qui renforce le mystère de la "soucoupe volante" de Bugeat, c'est que le même fait était enregistré, la même nuit, à deux heures d'intervalle, près de Valenciennes.