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Les OVNIS dans la presse quotidienne:

La vague française de 1954 dans la presse:

L'article ci-dessous est paru dans le quotidien Franc-Tireur, Paris, France, page 2, le 13 octobre 1954.

Scan.

La Commission Ouranos des soucoupes

II. - UN LIVRE SUR UN AUTRE MONDE

ET DES VESSIES POUR DES LANTERNES

Michèle Deixonne a interviewé hier Georges Lange, le fondateur [1] d'une commission internationale d'enquête sur les soucoupes volantes. Après lui avoir posé diverses questions, elle en vient à la principale: les soucoupes volantes existent-elles! [2]

"Mon insistance vous semblera peut être de mauvais goût, avais-je continué avec mon savant [3], mais, qui a vu ces engins? Quelques doux illuminés [4] qui ont raconté leur histoire, tirée tous droit des romans de science-fiction [5]. Et voilà encore une étrange coïncidence: ces hommes de l'espace sont toujours habillés tels que les romanciers d'anticipation les imaginent [6].

Sont-ce les romanciers qui par pur hasard ont prévu juste? Ou bien ces êtres célestes encore plus avancés que nous pouvons le supposer, ayant eu entre les mains de ces revues illustrées, et ne voulant pas nous décevoir Ont-ils pousser la gentillesse de s'habiller tout spécialement pour nous?

- Vous vous moquez, si je n'étais pas galant, je qualifierais votre entêtement... Vous ne croyez que ce que vous voyez.

- Non pas! Mais je suis sûre que si je m'amusais à dire que tel jour, à telle heure, j'ai vu un anneau volant, il se trouverait bien deux ou trois farfelus pour affirmer de toutes leurs forces, qu'eux aussi il ont [sic] vu mon anneau. Et qu'à la suite de cette déclaration fantaisiste, il se déclencherait un peu partout, une épidémie d'observations d'anneaux volants. C'est une expérience que j'aimerais faire [7].

- Je vois que je ne parviendrais pas seul à vous convaincre de l'existence des soucoupes! Mais avez-vous lu tous les témoignages que nous avons recueillis à Ouranos? C'est Jimmy Guieu qui les a classés et qui en a fait un livre. Vous devriez le lire, je suis certain que vous seriez ébranlée [8].

Après avoir pris congé de mon sympathique contradicteur, je me suis empressée de suivre son conseil, et je me plonger séance d'entendre la lecture de ce très intéressant ouvrage: "Les soucoupes volantes viennent d'un autre monde".

J'ai le regret de dire que je ne suis pas convaincue ni même ébranlée. J'irai jusqu'à dire que cette lecture m'aurait plutôt renforcée dans mon opinion première. J'ai vainement cherché, examiné, analysé, je n'ai rien trouvé de probant.

Et pourtant ce n'est ni la matière ni les témoignages qui manquent! Ce qui est grave, c'est qu'en aucun cas il est démontré que les témoins ont vraiment vu une soucoupe, ou qu'ils ont cru voir une soucoupe [9].

Ici, c'est un motocycliste qui a vu une "boule de feu". Ce sont deux promeneuses qui ont aperçu une "lueur" (?). [10] Là, c'est un instituteur et ses deux enfants qui auraient observé une escadrille de boule verte laissant tomber des filaments blanchâtres. Ils en recueillirent de pleines brassées, malheureusement ce qui aurait pu être une belle preuve de l'authenticité de leurs dires, s'est "volatilisé" entre leurs doigts... Vraiment dommage! [11] Et tout le long, ce sont des preuves aussi convaincantes et aussi consistantes.

Bien sûr, l'auteur n'a pas manqué de mettre en relief l'aventure arrivée à ce pilote américain qui parti dans son avion à réaction à la poursuite d'une soucoupe fut volatilisé en l'air avec son appareil. De là à conclure que de méchants Martiens l'avaient occis, il n'y avait qu'un pas qui fut vite franchi. [12]

Ces Martiens ou Vénusiens ou les deux (on ne sait) sont bien versatiles, entre nous! Tantôt, comme ce pauvre pilote, où ce chef scout brûlé au bras par un liquide lancé par les occupants d'un cigare [13], tantôt, dis-je, ils manifestent à notre égard des sentiments dénués d'aménité, Tantôt, au contraire, ils se posent et sautent au cou des paysans [14], promeneurs ou jeunes filles sans distinction d'âge, de condition ou de sexe.

M. Jimmy Guieu est vraiment un enquêteur consciencieux puisqu'il ne se borne pas aux témoignages contemporains, et que, remontant le cours de l'Histoire, il nous démontre que les soucoupes ne sont pas une nouveauté, loin de là. En effet: en 1900, en 1871, il en était déjà question. Puis c'est en 1697, en 1593, 1390, 1027 qu'on trouve des textes relatant les apparitions dans le ciel de boules de feu et de disques argentés. Petit à petit, on arrive à Jésus-Christ, on le dépasse avec un certain Zacharie qui vivait 400 ans avant notre ère, et qui, lui, relate l'apparition d'un rouleau volant. Puis c'est le prophète Ezéchiel qui nous fait part de sa rencontre avec une "grosse nuée", laquelle ne pouvait être évidemment, nous dit l'auteur, qu'une soucoupe. [15]

Mais là où je me suis demandée s'il fallait que je rie, ou si M. Jimmy Guieu prenait ses lecteurs pour des imbéciles, c'est quand il cherche à démontrer que l'ange Gabriel, rendant visite au prophète Daniel, n'est pas autre chose qu'un Vénusien débarquant de sa soucoupe. Le pauvre Daniel ignorant, bien sûr, du terme soucoupe nous dit que l'ange descendit d'un char de feu. La similitude saute aux yeux, et il faut être bien chinois pour ne pas la voir.

Nos ancêtres les Martiens

De l'ange Gabriel, nous passons aux premiers hommes, et aux anciennes civilisations disparues aujourd'hui: Incas, Hindous, Atlantes (?), etc. Les soucoupes sont déjà là. On en retrouve des traces sous une forme imagée, mais facilement décelable: dans les vieilles légendes tous les pays, et dont l'origine se perd dans la nuit des temps, il est toujours question de dragons volants de dieu descendant de chars de feu, de personnes enlevées par la voie des airs... Ne cherchez pas plus loin, ce sont les soucoupes et les cigares qui en sont l'origine. Mais à cette époque ils ne craignaient pas de se poser sur la Terre, afin de nous instruire, et c'est pourquoi toutes ces vieilles histoires parlent de dieu bienfaisant, qui n'étaient autre que les Vénusiens. Ceci est le point de vue de l'auteur.

Néanmoins, avec une grande honnêteté, il nous présente une autre explication due au professeur R. Lencement qui mérite vraiment réflexion: "Il y a environ 300,000 ans, ou peut-être même un million d'années (le professeur n'en est pas à quelque 700,000 ans près), une expédition venue de Mars est arrivée sur une terre uniquement peuplée de la faune tertiaire terminal. Surpris par des conditions physiques qu'ils n'avait pas toutes prévues, ces Martiens n'ont supporté qu'à grand peine une brutale diminution de leurs facultés et n'ont pu repartir - pesanteur plus forte, atmosphère plus dense, maladie microbienne, astronefs détériorés, etc. Pourtant, ils ont survécu après une lente acclimatation et par une rapide dégénérescence..."

Sommes-nous les lointains descendants de ces ancêtres? C'est la question que se pose Jimmy Guieu. Voilà qui mettrait d'accord ceux qui pensent que l'homme descend du singe qui pensent que l'homme descend d'Adam et Eve. A moins que nous ne descendions des trois?...

Michèle DEIXONNE
(A suivre.)

Notes:

Franc-Tireur était un journal très à gauche, et il se trouve que la "ligne du parti" à cette époque, présentée comme du "rationalisme", était que les soucoupes volantes n'existent pas. Elle ne seraient que des racontars de farfelus, inspirés par la Science-Fiction publiée par "l'impérialisme américain". La doctrine communiste au contraire entendait faire apparaître un homme "nouveau", débarassé de toute irrationalité telles que religions, soucoupes volantes etc.

Franc-Tireur rapportait des affaires de soucoupes volantes en 1954, comme les autres journeaux, mais de manière assez différente:

Je ne suis pas sûr que dans cet article, le journal ait fidèlement et correctement rapporté les propos de "l'adversaire", Georges Lange. Je peux en tout cas signaler ce qui suit:

[1] Erreur. Georges Lange n'était pas le fondateur de la Commmission d'Enquête Ouranos. Le fondateur pour la France était Marc Thirouin, en 1951, avocat de profession et premier français à avoir compris la nécessité de l'enquête sur le terrain.

[2] Ici, il aurait fallu un point d'interrogation.

[3] Georges Lange était un astronome amateur, il n'était nullement un "savant".

[4] Qui connait le sujet sait bien qu'on trouve des récits de "doux illuminés" mais qu'il est malhonnête de faire croire que tous les rapports d'observations émanent de "doux illuminés".

[5] Ceci revient encore à qualifier la totalité des témoins allégués de menteurs.

[6] Du fait de la grande variété des descriptions par les auteurs de Science-Fiction, il sera facile de trouver des "coincidences". Mais en réalité, l'argument ne tient pas. Par exemple, dans la Science-Fiction de l'époque, les "Martiens" avaient souvent des tentacules nombreux, ou plus de deux yeux, ils étaient souvent des "monstres gluants" sans aucun habit. Parfois, ils étaient exactement comme les humains. Parfois, juste un détail, comme des oreilles en pointe, les distinguaient des humains. Pour les témoignages de 1954 en France, les "Martiens" étant fort peu garantis (canulars, farces, méprises), il n'est pas honnête de rejeter toutes les "soucoupes" avec ce genre d'arguments.

[7] De toute évidence, Michèle Deixonne n'a pas besoin de faire cette expérience, puisqu'elle est déjà "sûre" qu'elle a raison. J'ai fait cette expérience en 2002. Un appel à témoin dans le journal régional pour une observation (réelle mais causée par un avion), a effectivement sucité une vingtaine de témoignages inédits, mais de rapportant tous à d'autres observations en d'autres lieux et d'autre dates. Ce n'est pas compliqué: ces gens avaient aussi vu quelque chose et ne l'avaient jamais rapporté parce qu'il ne savaient pas à qui le rapporter, et par cet appel à témoin, ils ont eu un "point de contact" et une raison de pense qu'au lieu de se moquer d'eux on allait les entendre. Que suite à une publication sur une observation, des "faux témoins" se soient manifestés n'est pas une chose impossible, mais il n'y a jamais eu la moindre démonstration sérieuse que ce soit une chose systématique.

[8] Malheureusement, Jimmy Guieu, déjà à cette époque, a parfois pris des "vessies pour les lanternes". Son livre n'était d'ailleurs pas un recueil d'observations receuillies par Ouranos et classées, mais un livre plus général sur la question. Guieu a été un de ces ufologues "jusqu'auboutistes" comme il en existe beaucoup, qui a eu vraiment grand peine, pour ne pas dire plus, à admettre qi'il existe effctivement des canulars et des méprises dans la vaste casuisitique ufologique.

[9] Si on peut admettre que la lectrice n'ai pas été convaincue que les témoins ont vraiment vu une soucoupe, j'ai du mal à comprendre qu'elle ne puisse même pas admettre que des témoins aient cru en voir une. Si la lectrice avait réellement "analysé" quelque chose, elle aurait pu au moins comprendre qu'il existe bien des méprises, vécues par des témoins parafaitement honnêtes.

[10] Michèle Deixonne choisit les observations les plus vagues et les rend encore plus vagues qu'elles ne l'étaient. Le livre de Guieu a bien des défauts, mais un lecteur sérieux constatera que les cas retenus par Michèle Deixonne ne sont certainement pas les plus impressionants. Il est vrai que Jimmy Guieu, comme bien d'autres alors, semblait incapabale de distinguer un météore d'une "soucoupe volante", ce qui fait que des observations facilement explicables ainsi abondent dans son livre.

[11] Ah! Si les choses étaient aussi simples... Des témoins qui prétendent avoir une preuve matérielle, mais celle-ci se "volatilise" toujours, dont ces "témoins" étaient des menteurs. On se référera à ce cas de la vague de 1954, dans lequel les témoins ont prétendu avoir la même sorte de preuve, qui s'est tout autant colatilisée, et pourtant ils n'avaient commis nul mensonge.

[12] Il s'agit bien entendu de l'affaire Mantell de 1948. Non, ce pilote - pas un doux illuminé - n'était pas parti à la poursuite d'une soucoupe en avion à réaction, mais en avion de chasse P-51 Mustang à hélice. Effectivement Jimmy Guieu comme d'autres l'a cru occis par des méchants Martiens, et effectivement, c'est faux. Michèle Deixonne n'a toutefois pas pu nous dire pourquoi. A l'époque l'Air Force avait voulu expliquer au public que Mantell poursuivait la planète Vénus. Mauvaise explication; il avait tenté d'approcher un ballon de haute altitude Skyhook de l'U.S. Navy, alors inconnu de l'U.S. Air Force.

[13] Michèle Deixonne là encore se moque bien des faits. Le cas est celui de Sony Desvergers, raconté notemment par l'enquêteur de l'US Air Force. Ce n'était pas un "cigare" mais une "soucoupe". Le témoin n'avait cependant pas du tout exprimé qu'il aurait vu des occupants, ni interprété son expérience comme une renontre avec des extraterrestres. Il se demandait ce qu'il avait vu. Aucun "occupant" n'a été vu avec certitude. Il n'a pas été brûlé qu'au bras, et pas du tout "par un liquide lancé par les occupants". L'enquêteur de l'U.S. Air Force avait expliqué: "Pour être très honnêtes, nous essayions de montrer que c'était un canular, mais n'avions absolument aucun succès. Chaque nouvelle piste que nous avons explorée pointait fortement vers la même chose, une histoire vraie."

[14] Affaire Mazaud en 1954. Là encore le témoin - rien ne permet de le qualifier de doux illuminé - n'a jamais pensé avoir eu affaire à un extraterrestre, et son histoire n'a été connue que parce que son épouse en a parlé. Aucun autre "Martien" n'a d'ailleurs "sauté au cou" de quelque autre paysan ni "promeneurs ou jeunes filles" lors de la vague de 1954 en France. Et hors affaire Mazaud, aucune autre telle chose n'est mentionnée dans le livre de Guieu.

[15] Pour répondre au "camp" affirmant que les soucoupes apparaissent en même temps que la Science-Fiction, le "camp" opposé pointait d'anciens récits de ce qui, selon les auteurs était, ou pouvait avoir été, des observations d'engins extraterrestres précédant la Science-Fiction. Exercice légitime ans mon opinion, mais bien difficile. On trouvera effectivement bien des météores interprétés comme "prodiges", bien des allégories dont il sera impossible de démontrer qu'elle aient la moindre réalité.

Mais présenter la "vision" attribuée à Ezechiel comme celle d'une "grosse nuée" montre encore une fois que Michèle Deixonne n'a guère de leçons à donner à Jimmy Guieu:

"J'ai vu: quatre roues près des Kéroubim [Chérubin], une roue près de chaque Kéroub. Les roues scintillaient comme une pierre de chrysolithe. Toutes les quatre paraissaient avoir même forme ; elles étaient comme imbriquées l'une dans l'autre. Quand ils avançaient, ils allaient dans les quatre directions. Ils avançaient sans s'écarter, car ils avançaient du côté où était dirigée la tête. Ils avançaient sans s'écarter. Tout leur corps, leur dos, leurs mains, leurs ailes, ainsi que les roues, étaient remplis de scintillements, autour des quatre roues. A ces roues fut donné le nom de Galgal [cercle]; je l'ai entendu. Ils avaient chacun quatre faces: la première était une face de Kéroub; la deuxième, une face d'homme ; la troisième, une face de lion; la quatrième, une face d'aigle. Les Kéroubim s'élevèrent – c'était le Vivant que j'avais vu près du fleuve Kebar. Quand les Kéroubim avançaient, les roues avançaient à côté d'eux; quand les Kéroubim déployaient leurs ailes pour s'élever de terre, les roues ne s'écartaient pas mais demeuraient à côté d'eux. Quand ils s'arrêtaient, elles s'arrêtaient; quand ils s'élevaient, elles s'élevaient avec eux : l'esprit du Vivant était en elles!" (Ezéchiel 10, 9-17)

Ce que Guieu proposait au sujet de cette "vision" a été clairement caricaturé par Michèle Deixonne. Voir son livre, page 238:

Apparemment, et en toute logique, ce qui précède est un fatras d'élucubrations. Mais en fait, cette "vision" est certainement bien autre chose, comme tend à nous le prouver une analyse "comparative". (Naturellement, je n'affirme rien et avance seulement une hypothèse que je crois fondée).

Ezéchiel et ses contemporains ignoraient tout de nos termes techniques, et cela se conçoit aisément. Assistant à l'atterrissage d'un avion et à la sortie de son équipage, un pygmée ne pourrait s'exprimer que par des mots simples dont il connaitrait bien le sens. Parfois, ne possédant pas de termes adéquats pour définir un être ou une chose, il l'aurait remplacé par un mot impropre mais représentant le plus possible l'être, la chose ou l'événement en question. Ainsi pour lui, l'avion aurait été un "gros oiseau" (pour les "civilisés" du moyen âge un astronef eût été un "dragon volant" tout comme actuellement ils sont des "météores" pour les incrédules). Un grondement de moteur ou de réacteur aurait été... le bruit de grandes eaux (cataractes)... etc.

Je veux bien rire de l'argument de Guieu "actuellement ils sont des 'météores' pour les incrédules", mais Guieu pointe pourtant quelque chose de très important et très sérieux au moins pour moi, la question de l'incommensurabilité, soit la rès faible probabilité qu'une intelligence X soit réellement en mesure de comprendre et décrire avec la moindre pertinence des actions ou intentions d'une intelligence Y quand la distance temporelle, culturelle, voir biologique est grande. (Voir la littérature anthropolique sur des premières rencontres entre civilisations humaines différentes, ou ceci).

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Cette page a été mise à jour le 23 juillet 2025.