L'article ci-dessous est paru dans le quotidien Samedi-Soir, Paris, France, le 14 octobre 1954.
Dossier sur cette affaire ici.
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Quarouble (Pas-de-Calais), vendredi 10 septembre 1954, 22 h.15:
MARIUS DEWILDE, 34 ans, ouvrier aux Aciéries de Blanc Misseron, lit un magazine dans sa cuisine (il serait intéressant de savoir de quoi parlait ce magazine) [du naufrage d'un navire, l'Abeille], Au premier étage, Mme Dewilde et son fils reposent déjà depuis un instant. Tout est calme. Seul le tic-tac de l'horloge et le froissement des pages tournées rompent le silence.
Soudain, Marius Dewilde lève la tête, attentif. Au dehors, Kiki, son chien, aboie furieusement comme lorsqu'un étranger pénètre dans le jardinet. Quelqu'un à cette heure? Certainement pas un visiteur. Alors? Un rodeur, peut-être, ou un contrebandier? Marius Dewilde prend une lampe électrique et sort sur le pas de sa porte. L'air frais de la nuit le frappe au visage. Pendant quelques secondes, ses yeux mal accoutumés à l'obscurité de distinguent rien. Puis, au-delà de la barrière qui sépare le chemin de la voie de chemin de fer, il aperçoit une masse sombre, comme une charrette abandonnée sur les rails.
"Tiens..., pense Marius, un paysan a dételé sur la voie. Il faudra que je prévienne la gare pour qu'on l'enlève, ça pourrait causer un accident."
Pendant ce temps Kiki vers la droite continue à s'étrangler de fureur. Marius Dewilde presse le bouton de sa lampe de poche et dirige le rayon lumineux vers l'endroit où se trouve Kiki. Et alors, il voit...
A trois ou quatre mètres de lui, sur le chemin qui passe devant la maison, deux êtres marchent l'un derrière l'autre vers la masse sombre aperçue sur la voie. Ils sont petits (pas plus d'un mètre). Celui des deux qui marche devant tourne la tête vers Marius Dewilde qui a l'impression de se retrouver en présence de deux scaphandriers extrêmement larges d'épaules et dont les casques jettent des reflets métalliques.
D'abord stupéfait, Marius court vers la porte du jardin, pour couper la route aux inconnus. Alors, dans la masse sombre posée sur la voie, s'ouvre une fenêtre de forme carrée d'où jaillit un rayon vert qui se pose sur Dewilde. Aussitôt, l'homme est paralysé, cloué sur place. Ses jambes lui refusent tout usage.
Pendant plusieurs secondes, il est ainsi incapable de faire un seul mouvement, puis soudain, le projecteur d'éteint, et Marius retrouve l'usage de ses muscles. Il se rue vers l'engin, mais il est trop tard. Avec un sifflement et une épaisse fumée noire, la masse sombre s'élève dans l'espace en se balançant légèrement. On dirait une cloche à fromage haute de trois mètres et de cinq à six mètres de diamètre. La cloche monte... monte... Elle prend une couleur rouge-orange, et disparaît vers l'ouest. Marius Dewilde et ses Martiens entrent dans la légende.
Comme dans le cas Mazaud, la police enquête. Cette fois, c'est la police de l'Air. Pourquoi la police de l'Air? Mais parce qu'il s'agit d'un engin volant, bien sûr. On "cherche" des traces d'atterrissage sur la voie ferrée et l'on en "trouve". Cinq éraflures sur les traverses. Un des inspecteurs déclare:
- UN ENGIN QUI AURAIT ATTERRI SUR DES BEQUILLES NE LAISSERAIT PAS D'AUTRES TRACES!
Marius Dewilde a été victime, autrefois, d'un traumatisme crânien à la suite duquel il a, paraît-il, manifesté quelques troubles nerveux. Un psychiatre aurait peut-être des questions à poser, mais cette hypothèse est exclue. Personne ne soumettra le témoin à ce que les américains appellent une "cross-examination", c'est à dire à un véritable interrogatoire destiné à relever dans son récit des contradictions ou des invraisemblances. A quel titre, d'ailleurs, procéderait-on à ces examens?
Marius Dewilde n'est pas un malfaiteur ou un fou. Il ne menace la sécurité de personne. Il n'a pas appelé la police. Il est parfaitement libre, comme tout citoyen français, de raconter ce qu'il a vu ou ce qu'il a cru voir et de donner aux événements dont il prétend avoir été le témoin la version qui lui plait ou à laquelle il croit.
Dans ces conditions, pourtant, il est permis de se poser la question: où est la vérité scientifique?
[Photographie avec légende:] Quelques heures après Mazaud, Marius Dewilde, de Quarouble (Pas-de-Calais), a vu, lui aussi, deux "Martiens". Il a eu droit, en plus, au scaphandre et au "rayon paralysant". Lui aussi a voulu, après coup, prendre un gendarme à témoin.