L'article ci-dessous est paru dans le journal La Suisse, le 2 juillet 1954, en page 1.
Mars est tout près de nous, à 56 millions de kilomètres, ce qui, pour un astronome, équivaut en somme à trois fois rien ou presque.
Pour un profane naturellement, les choses sont un peu différentes et une pareille distance serait bien proche à décourager même les sportifs les plus résolus et les avions les plus "supersoniques."
On a beau essayer de se la représenter, on n'y parvient pas: 56 millions de km mis bout à bout, est-ce que vous voyez ça? Moi, j'avoue que ça me parait un bien grand ruban, trop grand même pour être enroulé autour d'une des tours de St-Pierre, ne croyez-vous pas?
Il est peu probable que malgré cette "proximité" bien relative, on puisse cette fois encore résoudre le problème qui tourmente les observateurs du ciel: la planète Mars est-elle habitée, oui ou non?
Jusqu'ici, on l'a nié avec une belle assurance, une assurance qui me paraît même un peu trop absolue: sous prétexte qu'il n'y a pas là haut d'atmosphère digne de ce nom et que les conditions n'y sont pas semblables à celle qui règnent sur la terre, on décrète une fois pour toutes que la vie y est impossible. Telle que nous l'entendons, c'est probable, en effet, mais pourquoi ne pas admettre que d'autres êtres, aussi vivant que nous mais fabriqués, bien sûr, un peu autrement, peuvent s'en accomoder?
On le saura sûrement un jour, quand les fusées astronautiques permettront à tout un chacun de s'offrir un petit week-end martien à des prix défiant toute concurrence.
En attendant, puisque nous en sommes réduits aux hypothèses, il paraît plus sage de ne pas nier avec l'assurance du monsieur à-qui-on-ne-la-fait-pas, la possibilité d'une vie martienne. D'ailleurs, quand les soucoupes volantes - au fait, que deviennent-elles? - nous venaient visiter, des savants, aussi savants que d'autres, ont émis l'idée que c'était notre "voisine" céleste qui nous les envoyait. Donc, il fallait bien que quelqu'un les ait fabriquées et les dirige. On aurait tout de même quelque peine à admettre l'idée d'une création spontanée et d'un vol sans personne pour en prendre l'initiative.
Enfin, on verra bien, un jour ou l'autre, pultôt l'autre sans doute. En attendant, les astronomes sont rivés à leurs lunettes comme des astéries à leur rocher, mais il ne faudrait pas que les nuages leur fissent rater cette occasion de dévisager notre soeur céleste. Sur 56 millions de kilomètres, il peut s'en ammasser quelques-uns, même s'il ne s'en trouve pas au-delà de notre atmosphère.
LE PASSANT